La gratuité des transports publics : un sujet débattu

La gratuité des transports publics : un sujet débattu

[Décryptages - Développement durable]

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Aubagne, Bar-le-Duc, Castres, Châteauroux, Cluses, Colomiers, Compiègne, Dunkerque, Gap, Issoudun, Libourne, Niort : ces villes figurent parmi la vingtaine de municipalités françaises – de toutes tendances politiques – ayant mis en place, sans condition d’âge ou de revenus, la gratuité des transports en commun sur l’ensemble de leur réseau. Colomiers (Haute-Garonne, 39 000 habitants) a été la première à adopter cette formule, dès 1971. Dunkerque (Nord, 200 000 habitants sur la communauté d’agglomération) est à la fois celle qui s’est engagée pleinement le plus récemment, en 2018, et celle qui poursuit l’expérience à la plus grande échelle. Le retour d’expérience est contrasté.

La gratuité a accru de 40 à 200% la fréquentation des transports publics, mais sans réduction substantielle de la circulation automobile ! Si le dispositif facilite la mobilité de ceux qui se déplaçaient antérieurement peu pour des raisons de coût, il n’induit pas en revanche de changement notable dans les modes de locomotion. En particulier, les automobilistes ne renoncent pas à leur véhicule lorsqu’une offre alternative non payante de transport leur est proposée. La gratuité n’a ainsi pas d’impact positif significatif sur le bilan énergétique de la circulation urbaine. Elle peut même avoir un effet négatif lorsque les municipalités sont contraintes d’accroître leur parc d’autobus pour répondre à la demande des usagers qui renonçaient jusque-là à se déplacer pour des motifs financiers.

La gratuité ne diminue pas le niveau d’incivilité. Celui-ci a même parfois tendance à augmenter du fait de l’absence de contrôleurs. Sur le plan budgétaire, la gratuité n’induit pas non plus d’améliorations conséquentes. La suppression des automates et personnels de surveillance est de portée très limitée sur le coût global du transport public. Dans certains cas, c’est d’ailleurs l’inverse qu’on observe : le renforcement du parc de véhicules augmente la facture du transport collectif.

Enfin, la philosophie économique de la gratuité des transports en commun fait débat. Lorsque les transports publics sont payants, le prix acquitté par les usagers couvre généralement les besoins de financement à hauteur de 15 à 25%, le solde étant assuré par la taxation des entreprises et la contribution des collectivités territoriales – c’est-à-dire l’impôt. Dans les communes ayant opté pour la gratuité, ces deux derniers postes, notamment l’impôt, ont le plus souvent été augmentés. On fait ainsi payer en totalité par tous les contribuables un service que certains seulement utilisent. C’est, certes, le principe même du service public, mais les avis sont partagés sur sa pertinence économique et son équité dans le cas des transports en commun.

A côté de ces constats plutôt négatifs, la gratuité affiche deux résultats positifs d’importance. Le premier est d’ordre sociétal : en permettant à des catégories de population peu mobiles de circuler plus facilement, on renforce l’inclusion. Le second, et non le moindre, est de nature commerciale. La gratuité des transports publics attire vers les centres-villes une clientèle qui avait tendance à ne plus les fréquenter. Pour les partisans de la gratuité du transport en commun, ces deux avantages rendent son actif bien supérieur à son passif et justifient que son développement soit poursuivi.
 

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